lundi 9 juin 2008

Le métier change / Anne-Marie Builles


La Zazou attitude
L’identité est pour l’entreprise le point de rencontre de ses cultures de ses valeurs, de la réalité du moment, de son image et de ses ambitions
C’est la définition qui a cours dans le métier du design d’identité visuelle.
Mais comment ça marche réellement, aujourd’hui, un projet d’identité visuelle ?
La revue Etapes graphiques dans son dernier numéro, sous la plume de Caroline Bouige en propose une illustration riche d’enseignements au travers d’une description très précise du concours « work in progress » proposé par l’Ecole Spéciale d’Architecture pour son changement de logotype.
Après avoir écarté les premières propositions de quelques « studios de renom » jugées trop « institutionnelles » l’équipe de l’école décide de lancer un concours international très large auprès de jeunes de jeunes diplômés.
L’annonce du concours se veut succincte pour « laisser parler le regard, l’interprétation et la créativité des candidats ». L’école recherche un visuel simple, symbolisant aussi bien l’inscription de l’école dans la contemporanéité que son caractère unique « spécial et libre », plus qu’un bon logotype, elle recherche une logique, un système, un univers.
Une seule contrainte délimite le cadre du projet; la désignation de l’Ecole Spéciale d’Architecture doit figurer en toutes lettres, in extenso, (les jeunes ne lisent pas les briefs, quarante dossiers sur la centaine reçus seront éliminés).
Au final l’équipe de l’école incite les candidats à la fantaisie, et attend une proposition « chic et zazou »
Trois projets seront finalement retenus, Caroline Bouige en analyse avec subtilité
Les partis pris et contenus graphiques. Les deux premiers projets sont intelligents mais manifestement inconciliables.
Le projet vainqueur du groupe « PlasTac » (pas le plus ambitieux ni le plus élaboré ajoute Caroline Bouige) présente un style graphique éclaté, en figures géométriques de couleur, un style déconstructiviste et « jazzy » pour prolonger la métaphore Zazou, à l’opposé, le projet de Cédric Quissola tout en rigueur graphique, très élaboré, très construit, progressant dans une logique orthonormée, « laissant courir tous les potentiels du système ».
À l’ère du tout communication, c’est la « mise en discours » libre, la qualité du lien émetteur/récepteur qui l’emporte sur la rigueur identitaire d’une « mise en signes », nous sommes loin « des fondamentaux » de l’identité. Privilège est donné à la forme sur le contenu.L’identité de l'école se résume finalement à une proposition pédagogique valorisant le « jeu », sa capacité à promouvoir une « attitude » particulière face à une tâche proposée, attitude ambivalente faite à la fois de liberté et d’implication, en somme une attitude propice à inciter le futur élève à s’adonner à l’étude avec intérêts et enthousiasmes multiples, tout en gardant l’esprit léger et libre face aux échecs de parcours.
Une très bonne stratégie commerciale pour une école privée.

Etapes Graphiques N°157 Juin 2008-06-06
www.etapes.com

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Merci pour ce bien bel article !

Bien à vous

Cédric Quissola