lundi 7 février 2011

design / beige mitterrand / didier saco


c’est frédéric dard, selon michel pastoureau qui nous le transmet, qui a donné cette expression chromatique à l’imperméable que porte son héros fétiche, alexandre-benoit bérurier, en allusion à la couleur d’un costume d’été, léger, en toile ou en lin, pas très bien coupé que françois mitterrand a porté pendant au moins deux ans et qui, pour michel pastoureau, “ne lui allait pas du tout”

et michel pastoureau de s’interroger de l’absence de toute réflexion stratégique sur l’image d’un président âgé pour lequel “un simple bleu marine aurait été mille fois discret et plus convenable”, alors que, “vêtu d’un vilain beige, avec une légère nuance moutarde avariée, le président semblait à la fois mal endimanché, vieilli et en fin de septennat bien avant la date”, et du nombre de voix perdues au début des années 90 à cause de “cet horrible beige mitterrandien”

c’est le pas que vient / enfin / de franchir une partie des taxis parisiens en choisissant l’efficacité universelle / vert, c’est libre, rouge, c’est occupé / pour le signal lumineux au-dessus de leur véhicule, en abandonnant les lucioles beigasses qui signalaient ce que personne n’a jamais compris quoi, sinon l’indifférence totale d’une profession de se faire comprendre de tous, face à des besoins concrets / trouver un produit, trouver un client, créer un marché

ce n’est pas encore londres, new york ou buenos-aires, et le parc des taxis parisiens n’est pas encore prêt à abandonner le choix de privilégier la vie personnelle et l’usage de sa voiture à des fins individuelles, à la vie professionnelle / être reconnaissable et opérationnel immédiatement, pour créer de l’activité et de la valeur


bien sûr, il est fondamental, pour tout projet design, d’entamer la réflexion sur le rôle essentiel qu’y tient la couleur, tout autant que la forme, dans les mutations de notre société, au-delà de ses pulsions consuméristes, ses tentations de mode et les postures rétives face à l’innovation

j’aime la conversation / converser, c’est parler avec, construire un échange en s’adaptant à tous les sujets, à s’intéresser aux échos, aux réponses, aux silences, aux disgressions et aux éclats

la construction d’une identité colorielle consiste à chaque fois à s’adapter et à créer des univers particuliers, parfois inédits, parfois crus impossibles, des associations de brillance, de matières, de profondeurs et parfois d’essais et de transgressions / notre métier premier n’est-il pas de convaincre à dire oui celles et ceux qui disent non ?

la création de l’univers coloriel d’une marque, d’un produit, d’un pack s’inscrit dans sa dimension particulière, son lien à son origine, son objectif, son réseau de distribution et sa durée de vie, et il nous faut convaincre de pouvoir démanteler les codes installés pour en apporter de nouveaux : tout ce qui se rapporte à l’eau peut ne pas être bleu, tout ce qui se rapporte au feu peut ne pas être rouge, à la nature vert, au solei et aux vacances jaune et orange, au paradis bleu ciel et à la nuit noir

couleurs rêvées et couleurs réelles, le cinéma, la littérature, le théâtre et le numérique nous transmettent la force du décalage, aux rythmes des métissages, du mélange des mots, des sons, des souffles et des sources et chacun construit son univers à partir de son histoire, entre quotidien et possible et entre réalité et fiction

la croix signalétique des pharmacies est verte depuis les apothicaires du moyen-âge parce la pharmacopée était, pour sa plus grande part, tirée du monde végétal / c’était une bonne idée
certaines pharmacies, en france depuis une dizaine d’années, ont remplacé la croix verte par une croix bleue ou par une croix verte et bleue / c’est une autre idée /
mais le poids de la nature dans la composition des medicaments et celui de la vente de médicaments dans le chiffre d’affaires des pharmacies nous incitent à revendiquer l’ouverture des codes coloriels consacrés à des codes coloriels destinés, non en fonction de l’offre, mais vers le marché : comment faire venir et augmenter le chiffre d’affaires

les couleurs de nos souvenirs / michel pastoureau / seuil / 18.00 euros

1 commentaire:

Laurence a dit…

Etonnamment, en Allemagne et en Autriche les pharmacies ("Apotheke") sont indiquées par un "A" rouge. Pour le sens de l’urgence ?