lundi 19 décembre 2011

design / la ligne / didier saco


la ligne, c’est la thématique qui traverse la fascinante exposition à la fondation cartier à paris autour des mathématiques

“le cancre, écrit john ruskin en 1904, pense que les lignes sont immobiles et les dessine toutes figées ; le sage perçoit le changement ou ce qui change en elles, et les dessine ainsi - l’animal en mouvement, l’arbre en train de croître, le nuage dans sa course, la montagne en train de s’éroder / lorsque vous regardez une forme, essayez toujours de voir ses lignes, celles qui ont influé sur sa destinée passée et auront une influence sur son avenir”

la ligne est à la source à la fois du dessin et de l’écriture, comme le hiéroglyphe en forme de tête de bœuf est le précurseur de notre lettre a, et comme le trait tracé au sol par les warlpiri, peuple aborigène du désert central australien peut représenter une lance, un bâton de combat ou une personne gisant au sol et le cercle un nid, un trou d’eau, une montagne, un chaudron ou un œuf

et, contrairement au développement du capitalisme industriel qui a voulu instaurer la division du travail et séparer, en les hiérarchisant, les fonctions intelligentes, imaginatives et créatives des tâches techniques, physiques et répétitives, le dessin n’est pas une pratique qui supplante l’écriture / l’auteur est un artiste littéraire et l’imprimeur est un artisan typographe, et tous deux dessinent, à partir de la ligne, qui des lettres et qui des textes

et nos usages et nos outils professionnels comblent ce fossé construit sur de seules bases artificielles de segmentations sociétales puisque ce qui n’était pas vrai il y a encore 20 ans / on pouvait écrire avec un stylo mais on ne pouvait pas dessiner avec une machine à écrire ne l’est plus : l’ordinateur est à présent l’outil commun à l’écrivain, à l’artiste, au designer et à l’imprimeur, tout comme les réseaux sociaux aujourd’hui comblent toute distance entre l’émetteur / l’émettrice d’un texte, d’une idée, d’un projet et celles et ceux qui l’approuvent ou le désapprouvent et le font savoir, avec la même audience, sinon décuplée

la ligne, ce sont des mots, des lettres et aussi des chiffres, des notes sur une portée / ce sont des des caractères, comme dans l’écriture chinoise et c’est la main qui la trace
comme la main se meut, en tracant des lignes, à l’intérieur et hors du dessin et de l’écriture, comme les gestes manuels que nous faisons au cours d’un diner où, par moments, nos mains sont occupées à manier les couverts et, à d’autres, nos gestes accompagnent la conversation

la ligne, c’est la trace faite par l’artiste richard long, “une ligne faite en marchant” en 1967, à force de faire le même trajet à pied dans un pré qui est devenu une ligne dans l’herbe

au début du design, il y a toujours la ligne

la ligne qui ne sépare pas le dessin de l’écriture, le créateur du technicien mais tout au contraire rassemble, par la forme, le projet, l’idée et l’intention, le concepteur et le commanditaire

c’est le mérite premier de l’exposition mathématiques destinée à toutes et tous / et en priorité à celles et ceux dont ce n’est pas le territoire de prédilection / l’usage de la ligne, par les circulations, les couleurs, les robots, designés par david lynch, le traitement des entretiens, la scénographie / le seul feu de cheminée, tout en numérique, en ligne et 1 couleur, totalement innovant et d’une totale intelligence mérite la visite / permet une perception claire, contemporaine et prospective d’un sujet, avant le 21 10 11, date d’ouverture de l’exposition, âpre

méditerranée/ fred rawyler et jean-louis dumas 2003 / carré hermès

une brève histoire des lignes / tim ingold / zones sensibles / 22.00 euros

mathématiques, un dépaysement soudain / exposition à la fondation cartier 261 boulevard raspail paris jusqu’au 18 03 12 / 9.50 euros

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