La place du design dans la ville est celle de la ville comme établissement humain où le vivre ensemble est aussi important que le vivre à plusieurs plusieurs.
Autrefois, la conception de la ville relevait de l’incantatoire / les palais de justice, les préfectures, les palais civils et nationaux, les mairies, les écoles, les églises, les prisons, les casernes proclamaient la réalité d’un pouvoir dominant et modèle unique, la volonté de le donner à voir et de le pérenniser.
Aujourd’hui, nul édile n’oserait passer commande d’un bâtiment inspiré par l’amour de la patrie, le désir de justice ou l’exaltation du savoir et de sa transmission, au risque de passer pour un défenseur de la pensée unique, et ce qui est vrai pour les bâtiments publics l’est tout autant pour les espaces publics, alors que l’espace public est à l’origine même de notre vie commune et de notre vivre ensemble.
Le forum, l’agora, c’est la naissance de la ville, de la cité, de la polis et du politique.
Ce sont les jardins de Le Brun à Versailles, comme la place Stanislas à Nancy et la place de La Concorde à Paris qui disent l’autorité, la puissance et l’harmonie et qui sont aujourd’hui confrontés à la Canopée, conçue par Patrick Berger au dessus du Forum des Halles à Paris, le Mucem, conçu par RIcardo Riccioti à Marseille et la rénovation de la place de la République à Paris par les architectes Trévelo et Viger-Kohler, qui disent la grâce et la légèreté, la nature nature et le renversement de l’équilibre de l’espace partagé.
En moins de trois cent ans, c’est notre rapport à la confiance qui a totalement basculé, et ce sont l’architecture et le design qui le disent le mieux, en passant de l’autorité et du modèle unique à la pensée plurielle et aux usages multiples, basés sur le concept de la confiance.
Sans la confiance entre les individus, toute société s’écroule.
Et la défiance, la peur, la déraison, la faillite, la guerre et la paranoïa menacent, et la judiciarisation des rapports contractuels, le désir de contrôle et la difficulté d’accepter la fragilité humaine sans laquelle la confiance n’existe pas, engendrent une société de défiance.
Ce qu’installent les percées vers la mer des façades du musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée à Marseille, les courbes et les voluptes de la Canopée et les espaces dégagés de la place de la République, c’est la confiance.
La confiance face à la banqueroute de Law, à la crise du prêt interbancaire en 2007, à l’égoïsme libéral, au doute systématique des théories du complot et à la multiplication des conflits juridiques dans la sphère privée / 70% des contentieux aux Tribunaux de grande instance sont familiaux, c’est déconstruire les craintes de l’autre, et c’est privilégier toujours le rond à la pointe, le blanc au noir et le léger au lourd.
La confiance, c’est l’espace partagé par plusieurs plusieurs, la réflexion nécessaire sur la taille surélevée des poteaux qui encadrent les passages piétonniers destinés à celles et ceux qui ne voient pas, ce sont les codes couleurs qui disent ce que les textes ne disent pas à celles et ceux qui ne savent pas lire et ce sont les accoudoirs systématiques sur les bancs publics pour celles et ceux qui n’ont pas les forces de se relever sans les bras.
La confiance, c’est le recrutement des 1 500 jeunes designers qui viennent d’avoir leur diplôme en France.
La confiance, c’est la gaze orange comme trame de la scénographie de l’exposition consacrée au design et au tourisme en Ile-de-France, et l’ourse comme emblème de la médiathèque de la Ville de Dinard, seconde ville la plus senior de France et dont l’une des vocations est de faciliter l’apprentissage à toutes et tous aux cultures numériques.
La confiance, c’est la forme qui améliore l’usage et l’usager qui sait mieux que personne ce qui lui va, quel que soit son âge, son histoire et ses désirs.
Exposition Lost in Paris, conçue par Maurizio Galante et Tal Lancman / Le Lieu du design à Paris
Médiathèque l’ourse à Dinard / architecte Ricardo Bofill / livrée le 21 09 13
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