mercredi 2 avril 2008

les disparus du design / didier saco


héloïse neefs vient de faire paraître aux éditions fayard “les disparus du littré”, nomenclature de quelques 25 000 articles de mots disparus du dictionnaire littré alors qu’ils y figuraient dans l’édition de 1876

abigoti, affrouer, s’allégrer, bureaumanie, chosier, clopémanie, congénialité, délinquer, désouci, électionner, gulpe, inavare, incogitance, jolier, naqueter, nivèlerie, romipète, somnicide, tulipomane : tous ces mots font partie de ces disparus ; ils peuvent nous sonner familiers car ils figurent dans la littérature française / chateaubriand, corneille, diderot, montaigne, rabelais, rousseau, saint-simon, voltaire, mais nul d’entre nous ne les écrit ou ne le prononce

le travail d’héloïse neefs et la préface d’alain rey nous donnent une multitude d’ouvertures qui dépassent la simple liste de mots
les linguistes admettent que la langue française compterait de 6 à 8 millions de mots, en intégrant les mots techniques et hors les noms propres, alors que les dictionnaires d’usage en comportent en moyenne 50 000
chaque dictionnaire, même s’il comporte le même nombre de mots, n’indique pas les mêmes / à quel moment, sous quelle autorité, dans quel projet un mot figure ou ne figure pas dans un dictionnaire ?
quel est le but de la liste, de la nomenclature / les mots usuels ou les mots usés ? / les mots qui font sens ou ceux qui font histoire ? alain rey cite du bellay : “de mon petit village fumer la cheminée” : quelle est la place de la cheminée dans un dictionnaire en 2008 : décor, chauffage ou message de vie familiale, d’abri, de chaleur, de nourriture ?

tout comme les disparus du littré, il y a aussi les disparus du design

qu’est ce qui aujourd’hui relève du design ? l’histoire, la fonction, la forme, le matériau, le projet ?
quelle est la place de la valentine, du téléphone en bakélite, de la calculatrice de bureau, du minitel, du canapé de le corbusier ? aux puces, sous les combles au musée des arts décoratifs ou en réédition ?

ce sont les époques, les usages, les énergies, la disparition de certains matériaux et l’apparition de certains autres qui déterminent la vie / et la disparition / de nombre de nos créations
nul d’entre nous ne travaillera plus jamais l’ivoire, tout en respectant éminemment tout le travail chryséléphantin / en or et en ivoire / des siècles passés

revendiquons le rôle essentiel des musées de conserver le travail des designers passés et de transmettre l’histoire de leurs projets, dans leur contexte, et donnons aux designers actuels leur place dans notre actualité, dans nos bureaux, nos usines et nos maisons / même si nos vies allongent, le nombre des canapés qui feront partie de nos vies est limité

héloïse neefs / les disparus du littré / fayard / 45.00 euros

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