lundi 21 juillet 2008

En toute connaissance de cause / a-m. builles


Sémiotique et packaging.

Début 2007, la marque de laitages française la plus célèbre dans le monde, au terme de 4 années de recherches menées par son centre de recherche de nutrition et avec l’appui de dermatologues indépendants, met au point une formule d’un yaourt qui nourrit « la peau de l’intérieur », un yaourt permettant de contribuer à réduire la perte en eau de la peau de 15% dès 6 semaines d’utilisation.

Une révolution au rayon frais, un lancement d’enjeu majeur pour la marque, l’expertise de la marque est appelée à la rescousse et, sur le site du produit, il y est question de « dermonutrition » et « complexe pronutris ».

En l’absence de contraintes légales, le produit peut surfer sur la vogue des alicaments avec un défi supplémentaire pour faire événement sur le linéaire ; jouer à fond le mélange des genres entre alimentation et cosmétologie.

La marque convie alors une célèbre agence d’identité packaging avec un seul mot d’ordre : de l’impact, de l’impact !

Pour faire plus cosmétique que cosmétique, l’agence a proposé un pack rose fushia, agrémenté d’éléments typés cosméto, typo et décor argent sur une forme arrondie et féminine.
Le lancement se fait en fanfare, dans de petits frigos roses placés dans les rayons cosmétiques des grandes surfaces.

Il semblerait aujourd’hui que le succès du produit n’est pas à la hauteur des attentes de la marque.

Une analyse sémiotique du packaging aurait pu révéler quelques motifs symboliques d’alerte quant au positionnement du produit sur son rayon.

Simples questions : le packaging était-il à l’image du projet et de la stratégie d’innovation et de rupture de la marque ? Le ressenti des effets visuels était-il en concordance parfaite avec son ambition sur ce produit ?

Si la valeur d’un produit dépend du degré de croyance et de désirs qu’il suscite, quelques « bugs » perceptibles intuitivement auraient pu être révélés, validés et confirmés par une étude sémiotique bien conduite.

Ici, on attend manifestement de la part de la consommatrice croyance et confiance aveugles, rien dans le visuel packaging ne vient conforter les allégations scientifiques et tout le capital recherche investi par la marque.
La désignation reste très abstraite sur le propos et, quant à la séduction cosmétique, la couleur très signalétique rose fushia, surconnotée féminine, n’est pas loin d’évoquer un univers de poupées mannequin bien connu des petites filles, au point que l’on se demande s’il n’y a pas une volonté de mise à distance ludique de la part de la marque.

La marque a-t-elle osé ce parti pris en toute connaissance de cause ?
L’innovation comporte toujours un risque d’échec mais, en matière d’ergonomie visuelle, s’affranchir des codes et des clichés de son univers de références n’est pas sans risque, sinon celui de tomber dans d’autres clichés.

Il est permis de limiter les risques dans toute démarche d’innovation.
Il existe un outil très fiable d’évaluation et d’optimisation de l’impact visuel des signes émis par la marque pour un positionnement donné.

Que ce soit au niveau préliminaire de la définition du positionnement, de la phase de création, dans le process d’ajustement du visuel pack ou, plus tard encore, dans l’évolution de la vie du produit, l’analyse sémiotique propose une méthodologie d’analyse très fiable qui peut faire économiser du temps, des moyens et de l’image à la marque.

Pour anticiper l’avenir du produit, l’analyse sémiotique crée les conditions d’un dialogue très fructueux entre la marque et son agence de design.


Clés et codes du packaging
sémiotique appliquée
Marina Cavassilas
(éditions Hermes Lavoisier)

1 commentaire:

Anonyme a dit…

ravie de vous avoir rencontré dans notre belle campagne !
sonia